J'aime me me promener avec ma box 6x9 cm, parce que cet appareil est léger, inoff ensif (j'aime l'idée que ce ne soit pas du matériel professionnel, ˝sérieux˝). Ces boîtiers ne possèdent pas de cellule pour mesurer la lumière, pas de diaphragme non plus. Je ne peux déclencher qu'au 1/50 s ou sur la pause B. Plus de contrôle possible donc ou presque, je dois me soumettre à la lumière existante, me contenter de cadrer très approximativement dans le minuscule dépoli. Je fais des photos quand cela est possible ; j'ai le sentiment que, désormais, c'est en réalité le monde que je laisse entrer dans la boîte qui prend lui-même l'image. De ce parti pris de lâcher prise résultent ces vues intemporelles et immatérielles. Je ne crois pas à la ˝vérité˝ du document. Selon moi, le document ment toujours, l'imaginaire jamais.
La box 6x9 cm, comme les Holgas et autres Dianas, a la simplicité et la légèreté du stylo billes ou du crayon de papier - j'utilise des ordinateurs, des logiciels de traitement de texte et d'images, mais je reste attaché à l'utilisation de ces objets humbles et manuels... comme à l'envoi de cartes postales (l'une des formes idéales d'ailleurs pour moi de la diff usion de mes "Littoralités") et d'autres rituels dont on a, en si peu d'années, parfois perdu le goût, l'usage... Poreuse, l'image photographique s'imprègne du monde, et elle nous traverse... Ou peut-être est-ce nous qui la traversons. Comme l'écrivait Luigi Ghirri, le monde est déjà une image avant que nous ne le photographions.
Le temps et l'espace s'écoulent lentement dans ma box, impressionnent la pellicule. Je l'ai souhaité certes, je suis allé à la rencontre de ce phénomène, mais je ne l'ai pas voulu de manière dirigiste, programmatique. J'étais là, et le monde m'a dicté de déclencher.
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